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La politique ouvrière des compagnies houillères gardoises 1840-1922

Mines et contrôle social.
La politique ouvrière des compagnies houillères gardoises 1840-1922

Le décollage industriel du bassin alésien intervient en 1839-1840 avec la construction de la voie ferrée qui relie la région à la vallée du Rhône. En même temps que l’industrialisation, se met en place une nouvelle société, bien spécifique. Sa première caractéristique est la domination sans partage, exercée par les compagnies sur les communes minières, au moins jusqu’en 1914. La doctrine paternaliste, basée sur la communauté d’intérêts entre le patron et l’ouvrier donne au directeur une sorte de vocation à régir entièrement la vie de son personnel, « ses enfants » dont il doit assurer le bien-être matériel et moral. Ce contrôle social passe d’abord par une politique d’embauche, fondée sur un recrutement soit local, soit limité à quelques cantons ruraux d’Ardèche et de Lozère, par l’intermédiaire du clergé catholique local. D’autre part, pour faciliter le recrutement, et stabiliser leur personnel, les entreprises minières accordent alors différents avantages : suppléments de salaires comme la prime de Sainte-Barbe, avantages en nature, fourniture de services de santé, secours et pensions et ce bien avant les lois sur les caisses de retraites et de secours mutuels … En contrepartie, les compagnies ne tolèrent aucune contestation, que ce soit à l’intérieur de la mine (pas de syndicat reconnu avant 1917) ou à l’extérieur. Ainsi, les dirigeants des entreprises minières détiennent, jusqu’en 1914, un quasi-monopole de la représentation politique. Cette domination s’étend même jusqu’à certains domaines de la vie privée : l’Eglise et les écoles subventionnées par les compagnies inculquent aux ouvriers et futurs ouvriers une morale fondée sur le respect de l’ordre établi et l’exaltation du travail. Les loisirs, eux, sont, pour l’essentiel, encadrés par des associations (musicales, sportives…) créées, subventionnées et contrôlées par les compagnies. Ebranlée dans les autres bassins par le développement du mouvement ouvrier dès les années 1880-1890, cette politique de contrôle social reste ici très marquée jusqu‘à la 1ère Guerre Mondiale, avec une épuration systématique des personnels qui suit chaque période de contestation. Elle marque ainsi durablement les comportements socio-politiques de la population minière gardoise : après la guerre, le bassin minier cévenol est le seul à se défier de la voie réformiste et à se tourner très majoritairement vers la voie révolutionnaire avec la CGTU et le parti communiste.






Orientation bibliographique

- Jean-Michel Gaillard, Un exemple de ville-usine, La Grand-Combe et la Compagnie des Mines, 1836-1921, Thèse de 3ème cycle, Paris, 1974
- Bruno Mattéi, Rebelles, Rebelles. Révoltes et mythe du mineur 1830-1946, Champ Vallon, 1987, 318 p.
- Henri Pin, Les mines de houille dans le Gard et la condition des mineurs, thèse de droit, Montpellier, 1914, 239 p.
- Fabrice Sugier, Mineurs des Cévennes, Espace Sud, Montpellier, tomes 1 et 2, 1993-1994.
- Michel Vincent, Les mines des Cévennes : histoire des concessions et des chemins de fer miniers, Terre Cévenole, 2006.



Conférence de Fabrice Sugier
Vendredi 27 mai 2011 à 18 h.
Maison des Mémoires à Carcassonne

Dans le cadre du cycle de conférences "Mémoire des Mineurs en Languedoc Roussillon"